
Après la performance If you not me à la Chartreuse de Villeneuve lez Avignon 28 juillet 2009. Textes de Remi Checchetto, Carole Pelloux, Eli Commins, Sylvia Botella et Mathilde Lalle.
Elli Commins : Voici quelques images qui restent
“A la table des joueurs de cartes. On dit les règles. On commence à jouer. On n’applique pas les règles. On fait semblant. On joue. On parie des trucs. Je parie la veste du joueur d’en face. des objets sortent des sacs à main des deux femmes présentes à la table, rouge à lèvres, téléphone portable, carnet couvert de tissu délicat, presque midinette, ça m’étonne et ça me fait plaisir. On change de règles en cours de partie. Le joueur d’en face devient un peu méchant, je crois. La joueuse à ma gauche rit à gorge déployée, je ne sais pas pourquoi. La première main se passe bien et j’espère gagner la partie, je perds. Un joueur qui vient d’arriver remporte la mise et frappe sur la table. Des boules non identifiées trempées atterrissent sur l’occupante de la chaise qui fait face à la télé où l’herbe pousse. Eclaboussent aussi le mur à sa droite et deux ou trois participants qui ne le remarquent pas. Carole est en culotte. Des mots sont lus. Je change de place, je lis aussi, mots deux par deux, en contrepoint avec deux autres. D’où je suis, je note le regard de deux observateurs extérieurs qui me gêne un peu, il faudrait qu’ils viennent, je pense à leur dire mais ne le fais pas. Une boule mouillée m’atteint au front et tombe sur mon pantalon en faisant une grosse tâche. Je cherche la provenance, c’est du papier journal malaxé dans un seau d’eau, renvoi du projectile à l’expéditeur et ainsi de suite. Je me lève et regarde l’herbe pousser. Des phrases sont jetées dans la pièce, projetées, ou déposées, ou murmurées. Carole a remis son pantalon. Je lis. Un homme parle de faire du sexe avec Pippo Delbono. Je finis de lire mon texte auquel je n’ai rien compris. J’ai oublié les régles. Tu nous signifie que c’est la fin. Je repars avec une boule de journal en main.”

“Je est un autre
Jeu est dans l’autre
Je suis entrée dans la cellule du fou.
Je suis fou. Ici autorisé peut être mais pas tout à fait. Attention.
Je / nous sommes là pris dans le je(u) dans ton je(u) qui est aussi le mien / le nôtre. Tous ainsi entrés en je(u) – folie.
Non pas acteurs. Non : sans heurts
+ actants, oui : ants = en
Actant est un verbe au participe présent. Je participe / je suis présent
Participant au centre même d’une folie permise et tenue / ténue / t’es nue
Et nous tous avec, autorisés de je(u), autorisés dans notre folie (peut être ?)
(Je me souviens ici avec vous tous de ma folie)
Je nous souviens de nos folies, chacune une et toutes ensembles qui.
Nos êtres frères en folies douces.
Ça tourne, ça tourne là-dedans : dans le dedans de cette cellule du fou que tu nous a ouverte tous tournent et dans le dedans tournent tous aussi et remue tout ce qui.
Nous sommes actants de nos jeux et du tien, nous sommes là comme en communauté de jeu de folie. En chœur / cœur.
En ton chœur proposé au cœur peut être de ce qui nous bascule. Et touchant là à force de déplacements ce qui en nous bascule.
Tout joliment en douceur touchant le cœur de nos nostalgie basculantes.
Alors ici fous mais pas / plus encore, souhaitons au plus profond devenir fou là avec nous tous.
Actant d’une folie non pas feinte mais d’un jeu de folie (feu de jolie) où mémoire et sens chancellent (un peu).”
Rémi Checchetto Quelques petites notes pour Annie et son spectacle vu aujourd’hui le mardi 28 juillet 09
“Etre ensemble, partager les mots, partager les mots de la folie, les mots sur la folie, pouvoir les dire à voix haute, pouvoir les adresser à quelques uns, savoir que d’autres nous entendent, ne pas être seul et silencieux mais à plusieurs et à voix haute…
Se déplacer, ne pas être fixé à un « poteau de douleur », être mobile, changer de place, changer de point de vue, de point d’écoute, de regard…
Faire avec les cartes qui nous sont distribuées, faire avec les mots qui nous sont distribués, aller jusqu’au bout de la partie, jouer le mieux possible, aux cartes jouer avec un coéquipier, avec les mots jouer avec les autres…
Etre dans les mots des autres, avec les mots des autres, sans savoir qui il est, porter cette parole sans trop savoir d’où elle vient, ce mystère puisque à l’ordinaire nous savons d’où nous viennent les textes, ce fond obscure de l’origine comme l’est tout autant souvent le fond obscure de la folie…
Et ce moment où Annie et moi avons partagé un grand rire, un fou rire ou un rire fou, peu importe, ce qui comptait alors était le rire ensemble…
Et cela fait du bien, ce spectacle qui est prévu par Annie et que nous fabriquons ensemble, c’est bon comme de faire la cuisine à plusieurs, comme de voir les ciels d’été avec des amis, comme, comme et comme…”
Sylvia Botella : Chartreuse, juil. 09.
“Envie de briser les murs et les silences. Contre, tout contre. Des boulettes de papier mâché.
Lancées.
Tout contre la pierre. Pour briser les lignes. Suintent les murs.
Dans les plis et replis du journal jauni. La lumière. Percée. Le poison court.
Le cri et du savon dans les cheveux. De l’eau dégouline. Les épaules nues. Froid. Et des mots pour dire. Peut-être. Sans dire il va.
Le corps las.. Et les plis de ma chair. Contre. Les mains repliées. Dans la caverne.
Tout contre soi. A naître.”
Mathilde Lalle : La folie. Septembre 2009.
If you not me .mp3
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